Les émotions au travail relèvent du tabou. Enfin surtout celles perçues comme une faiblesse, une défaillance. La règle, c’est d’être rationnel, les mettre de côté et ne pas les faire subir aux autres : mais n’est-ce pas un non-sens biologique ? Comment vivre ses émotions en développant son intelligence émotionnelle au travail ?
Vivre ses émotions paraît nécessaire, mais c’est comme tout, il existe des limites, car elles peuvent devenir encombrantes et réagir sous l’effet d’une émotion peut aussi conduire à des comportements inappropriés.
C’est là qu’intervient la notion d’intelligence émotionnelle. Commençons par une définition :
L’intelligence émotionnelle c’est la capacité à vivre et exprimer ses émotions avec intelligence.
C’est savoir utiliser ses émotions pour nourrir sa réflexion et se servir de ses pensées pour comprendre ses émotions.
1. Comprendre et exprimer ses émotions
❝ Les émotions font partie intégrante de la nature humaine, elles sont le ciment de nos relations aux autres et donnent du sens à notre vie ❞ Gill Hasson
Qu’est-ce qu’une émotion ?
Le mot « émotion » vient du latin « e-motere », du verbe « se mouvoir ».
💡Une émotion, c’est, en quelque sorte, un signal que le cerveau envoie au travers d’une manifestation corporelle pour nous dire de réagir.
Il s’agit d’un état affectif, soudain, incontrôlé et irrationnel en réponse à un déclencheur. Sa durée et son intensité sont variables.
Les émotions s’accompagnent généralement de réactions physiologiques plus ou moins intenses comme la rougeur, la transpiration ou la modification du rythme cardiaque.
Si nous nous basons sur la théorie de Charles Darwin, il existe six émotions fondamentales :
🤩 La joie : préexiste à toutes les autres, c’est celle de la réussite, de la rencontre, de la satisfaction. Elle s’exprime par le rire, l’énergie, le bien-être, la gaieté, la bonne humeur. Les yeux brillent, le corps s’apaise. Elle accroît notre énergie et notre motivation.
😨 La peur : une émotion d’anticipation. Elle alerte sur un danger, une menace potentielle ou réelle. Elle peut être également liée à une appréhension, elle peut alors s’avérer stimulante ou bloquante. Elle s’exprime par la fuite, la vigilance, le corps en alerte.
😡 La colère : une réaction de protection qui alerte sur une frustration, un sentiment d’injustice, la rencontre d’un obstacle voir une atteinte à l’intégrité. Elle s’exprime par l’agressivité, une montée d’adrénaline, l’envie de crier, frapper.
😢 La tristesse : alerte sur une perte, une déception, un sentiment d’impuissance, un souhait insatisfait et s’exprime par une baisse d’énergie, de la motivation, le repli sur soi, le ralentissement du métabolisme. Physiquement, la gorge est serrée, les larmes montent.
😯 La surprise : alerte sur un événement inattendu, soudain en lien avec un changement imminent ou par une révélation allant à l’encontre de notre perception. Elle est généralement brève, puis s’estompe ou laisse place à une autre.
🤢 Le dégoût : alerte sur un rejet, une aversion physique ou psychologique envers un objet, un aliment ou une personne perçus comme nuisibles, nocifs. Elle s’exprime par le retrait et l’éloignement.
Souvent, les émotions se présentent en tiroir : derrière une émotion (qui elle-même se présente sous une multitude de nuances) peut s’en cacher une (ou plusieurs) autre(s). Parfois, il peut aussi nous arriver de vivre plusieurs émotions à la fois et que celles-ci soient contradictoires.
Il faut également discerner l’émotion cachée derrière une émotion écran (que l’on s’autorise/qui paraît socialement acceptable selon la situation).
Les déclencheurs émotionnels
Nous sommes en permanence confrontés à des déclencheurs émotionnels qui peuvent être externes (les situations que nous vivons) ou internes (nos représentations mentales, nos pensées, nos souvenirs, nos traumatismes).
💡 Nos émotions sont constituées de trois composantes : la pensée, les sensations physiques et le comportement. Chacune peut en déclencher une autre.
Par exemple, vous pourriez penser J’appréhende à l’approche d’un événement puis ressentir des sensations physiques (tensions) et que cela génère un comportement (ne pas tenir en place).
ou
Votre anxiété pourrait commencer à s’exprimer par une sensation physique qui vous fait penser à un événement que vous redoutez avec pour conséquence de faire les 100 pas…
Les émotions ont une utilité
Elles constituent nos boussoles intérieures, elles sont naturelles, c’est un réflexe primaire utile à la survie et au bien-être. Elles nous aident à nous adapter au mieux à notre environnement.
Elles visent à maintenir un état d’équilibre, en alertant de l’état de satisfaction de nos besoins psychologiques essentiels. Les émotions guident nos décisions, influencent notre mémoire et orientent notre attention.
Dans notre monde moderne, l’émotion n’est plus uniquement liée à notre survie. L’émotion est aussi une conséquence de nos pensées, de nos besoins et donc bien souvent en lien avec notre identité et notre histoire.
💡 Il n’y a pas d’émotion positive ou négative. Elles ont toutes une fonction positive : assurer notre sécurité, nous aider à prendre des décisions, développer nos liens sociaux, et stimuler notre processus créatif.
Comprendre nos émotions pour comprendre nos besoins
Derrière chaque émotion se cache un besoin. Satisfaire nos besoins est fondamental pour notre bien-être et l’estime que nous nous portons, c’est faire preuve de respect envers soi-même.
Décoder nos émotions nous permet de discerner nos besoins. Quelques exemples :
😰 Ma peur : besoin d’être rassuré.e
😡 Ma colère : besoin de réciprocité, de respect, ou de réparation
😢 Ma tristesse : besoin d’être consolé.e et d’un renouveau
😀 Ma joie : besoin d’être aimé.e, apprécié.e
Reconnaître nos besoins et ceux des autres nécessite un entraînement.
Pour développer cette capacité, à chaque émotion ressentie par soi ou autrui, je vous invite à :
- Tenter de trouver le déclencheur ;
- Décrire précisément son émotion ;
- Se poser la question à chaud puis à froid : « Qu’est-ce que cette émotion dit de ce qui est important pour moi/lui ? ».
La stratégie d’évitement émotionnel ne fonctionne pas
Se couper de ses émotions est une stratégie souvent utilisée pour ne plus souffrir à court terme… Mais ignorer un besoin ne le fait pas disparaître, nos émotions finissent par revenir et souvent de manière amplifiée si le problème est toujours présent dans la réalité.
Ce n’est donc pas une stratégie durable et elle peut même aller jusqu’à créer un climat très inconfortable.
Le gros problème de cette stratégie, c’est que si nous ne souhaitons pas voir nos émotions, nous ne pouvons pas traiter le message précieux qu’elle nous apporte sur l’état de satisfaction de nos besoins pour pouvoir réagir.
Un peu comme un pilote d’avion qui ne souhaiterait pas regarder les indicateurs en rouge sur son cockpit par peur d’être confronté à un problème.
Ne pas exprimer ses émotions, peut créer un blocage, des incompréhensions. Les cacher ou travestir, peut mener à une fatigue émotionnelle (qui peut aller jusqu’au burn-out).
💡 En bref, comprendre ses émotions suppose de :
– Reconnaître les 3 aspects des émotions (sensations physiques, pensées et comportement) ;
– Prendre conscience des différences, variations et degrés d’intensité des émotions ;
– Découvrir pourquoi et comment nous ressentons telle ou telle émotion.
2. L’intelligence émotionnelle au travail
❝ En un sens, nous avons deux cerveaux : un qui réfléchit et un qui ressent. C’est l’interaction entre ces deux systèmes de connaissance qui construit notre vie intérieure. ❞ Daniel Goleman
Pourquoi est-elle importante ?
La compréhension des émotions des autres est essentielle à notre bien-être social et à nos relations avec chacun.
Le fait d’être capable de percevoir les émotions des autres et d’y répondre d’une façon adéquate vous aidera à mieux vivre et mieux travailler avec eux.
Comme nous l’avons évoqué précédemment, comprendre vos propres émotions est également primordial pour votre bien-être personnel.
Entraîner son intelligence émotionnelle au travail ?
Il est nécessaire de :
– Accueillir et reconnaître ses propres émotions : écouter son ressenti sans juger ;
– Apprendre à les décrire précisément : Qu’est-ce que je ressens ?
– Savoir délimiter le déclencheur de l’émotion (événement et/ou situation) et les causes intérieures à l’émotion (besoins et évaluation subjective) ; Qu’est ce qui me fait réagir ? Quel est mon besoin non satisfait ? De quoi aurais-je besoin pour calmer mon émotion ?
– Satisfaire les besoins qui se cachent derrière nos émotions ; Quel est mon niveau de pouvoir sur ce problème ? Comment puis-je répondre à mon besoin par moi-même ?
– Exprimer ses émotions aux autres pour les informer sur notre état intérieur, nos attentes et nos besoins grâce à la communication non violente ;
– Apprendre à écouter attentivement les émotions des autres
– Prendre en compte les besoins des autres en lien avec leurs émotions ;
– Ouvrir la discussion avec les autres sur leurs attentes et leurs besoins grâce à la communication non violente.
Exprimer ses émotions
Nous ressentons tous des émotions, mais nous avons souvent du mal à les décrire précisément. Pourtant, c’est la première étape pour en prendre réellement conscience.
Quels mots utilisez-vous habituellement pour décrire les émotions que vous ressentez ? Connaissez-vous d’autres mots qui pourraient évoquer ? Peut-être avec des nuances de sens ? Et si vous ne trouvez pas les mots, pourquoi pas inventer vos propres mots ?
La flexibilité expressive
Exprimer aux autres ou garder pour soi ses émotions n’est ni bon ni mauvais en soi, cela dépend du contexte et de la manière de le faire.
Cela consiste à savoir quand il est souhaitable de répondre immédiatement et lorsque, au contraire, il faut prendre le temps de la réflexion.
La flexibilité, c’est disposer de 3 compétences :
1) Être capable de dire les choses
2) Être capable de garder les choses pour soi
3) Avoir la sagesse de choisir la réaction (1 ou 2) la plus adaptée à un contexte donné par rapport à nos besoins et aux contraintes extérieures
L’expression émotionnelle dépend souvent des normes familiales dans lesquelles nous avons grandi : est-ce que c’était ok ou non d’exprimer ses émotions ou de parler des difficultés ?
Assumer la responsabilité de ses émotions
L’intelligence émotionnelle commence par concevoir que nous créons nous-même nos propres émotions.
Nous disons et pensons souvent des choses comme “Elle m’a embarassé” “Il me met en colère” “C’est la seule personne capable de me rendre heureuse”…
Cela laisse suggérer que d’autres personnes et circonstances sont responsables de nos émotions. Ce n’est pas le cas.
Si quelqu’un est en colère contre vous et vous crie dessus, vous pourriez ressentir de la culpabilité. Cette culpabilité est votre réaction face à l’expression de la colère de quelqu’un. Vous l’avez créée.
💡 Il est important de reprendre possession de nos émotions et d’en endosser la responsabilité, c’est comme ça que nous pouvons avoir une prise sur elles.
Écouter les émotions de l’autre :
Écouter les émotions de l’autre permet de lui faire une place confortable dans la relation et de l’accepter dans sa globalité.
Selon Porter, nous pouvons répondre de 6 manières face aux émotions : proposer des solutions, juger, interpréter, consoler, investiguer et comprendre.
Nous sommes souvent centrés solution ou conseil. En faisant ça, nous envoyons le message que l’émotion n’est pas la bienvenue, car nous essayons de l’enlever par la résolution. Il est préférable d’apporter ce type de réponse lorsque l’autre le demande explicitement ou une fois qu’il s’est d’abord senti pleinement écouté.
💡Écouter, c’est faire de la place au vécu de l’autre, tenter de prendre la mesure de ce que l’autre vit et de comprendre sa représentation des choses, même si elle nous semble illogique ou à l’opposé de la nôtre.
Faites-vous accompagner :
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